ESPACE UEMOA : Comment la Boad compte financer le logement

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Le directeur, chargé de missions auprès du président de la Boad, Christian N. D. Agossa, était la semaine dernière à Dakar, dans le cadre d’une mission de promotion dans les pays de l’Uemoa, pour présenter le projet de création de la caisse régionale de refinancement hypothécaire aux responsables des banques et établissements financiers implantés au Sénégal. Dans cet entretien, il revient sur l’urgence et la nécessité de mettre en place cet instrument de financement du logement dans l’espace Uemoa qui a un potentiel des actifs éligibles à la titrisation évalué à 17 283 milliards FCFA en 2007, dont 363 milliards FCFA de créances hypothécaires.

Quelle est, selon vous, l’opportunité de la Caisse régionale de refinancement hypothécaire-Uemoa ?

La Caisse régionale de refinancement hypothécaire Uemoa est un instrument dont l’opportunité tient de la demande même exprimée par les banques de l’Union qui font des crédits aux particuliers pour l’achat de logements. Parce que pour ces banques, il y a un gros besoin de refinancement à long terme. C’est-à-dire que quand elles font de crédits à dix ans, quinze ans ou à vingt ans aux particuliers, elles ont besoin elles-mêmes de pouvoir emprunter l’argent quelque part à dix ans, quinze ans, vingt ans. Et souvent, elles ont des difficultés pour trouver cet argent-là à emprunter.

L’idée de la Caisse régionale de refinancement hypothécaire de l’Uemoa (Crrh-Uemoa), c’est donc de créer un établissement pour toutes les banques qui ont ce besoin d’emprunter de l’argent à long terme pour financer les prêts de logement. Cette caisse leur permet de se mettre ensemble pour faire leurs opérations d’emprunt à moindre coût et donc développer le crédit à l’habitat dans les pays de l’Uemoa. Nous avons travaillé sur ce projet avec la Bceao et avec le Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers (Crepmf) et maintenant, nous sommes en train de présenter le projet dans chaque pays de l’Uemoa, afin que les banques elles-mêmes participent pleinement au projet et souscrivent aux actions de la Crrh-Uemoa.

Cette caisse doit donc permettre aux futurs membres d’accéder à des ressources sur le marché financier à moindre coût et la Boad va l’y aider. C’est pourquoi nous avons nous-mêmes financé des études qui ont permis de confirmer que la faisabilité de cette caisse que les banques demandaient, est réelle et nous allons lui apporter un certain nombre d’éléments de soutien pour l’accompagner pour l’aider à réussir ses premiers pas sur le marché financier régional, afin qu’elle puisse emprunter à des conditions pas trop éloignées de celles de la Boad.

La contribution de la Boad au projet de caisse de refinancement est arrêtée à 15 milliards Fcfa pour la première et la deuxième année, 20 milliards pour la troisième et la quatrième année. Pour la cinquième année, elle débloquera 30 milliards F Cfa.

Le marché hypothécaire est-il le mieux adapté pour financer le logement dans l’espace Uemoa ?

Vous savez que nous n’avons pas encore de marché hypothécaire dans les pays de l’Uemoa. Nous avions présenté en juillet 2009, une étude sur l’évaluation du potentiel du marché hypothécaire et la titrisation dans l’Uemoa et nous sommes rendus compte que le potentiel des actifs éligibles à la titrisation est évalué à 17.283 milliards FCFA en 2007, dont 363 milliards FCFA de créances hypothécaires.

C’est pour cela que la Bceao, la Boad et le Conseil régional des marchés publics et financiers (Crmpf) travaillent ensemble pour créer ce marché hypothécaire, pour que ce soit facile pour les banques de l’Uemoa d’emprunter sur le marché dans n’importe quel pays de la sous-région, pour financer leurs opérations et tous les pays de l’Uemoa, ce sont des pays en voie de développement, comme vous le savez. Donc, nous avons toujours besoin d’argent et beaucoup d’argent pour financer les besoins d’infrastructures en même temps que les besoins sociaux de développement.

Il se trouve que chez nous, l’épargne est toujours un problème parce que nous n’avons pas beaucoup d’argent pour financer à long terme les investissements qui ont besoin du temps. Et c’est particulièrement le cas pour le logement qui est le principal investissement de ménage. Donc, c’est pour cela que nous avons besoin de mettre en place des instruments qui permettent de trouver de l’argent pour financer les investissements à long terme, particulièrement l’investissement de ménage qui est le logement. Donc, les pays de l’Uemoa en ont vraiment besoin.

Et la Crrh, c’est justement pour permettre à toutes les banques qui font le crédit à l’habitat et qui n’ont pas les moyens d’aller directement sur le marché financier, de se retrouver dans cette caisse-là qui va emprunter pour leur compte et leur redonner directement l’argent. Sa marge est une marge infime. C’est pour cela qu’on a proposé ce projet avec ses trois composantes que sont la titrisation, les obligations sécurisées et la caisse régionale de refinancement.

Comme vous le savez, dans les pays de l’Uemoa, il y a un problème d’harmonisation des législations sur le foncier. Dans ce cas, est-il envisageable de mette en place dans des délais assez courts, cet instrument de financement du logement ?

C’est vrai qu’aujourd’hui, au niveau régional, tout le monde n’a pas la même idée du titre foncier. Peut-être qu’il n’y a pas de titre foncier partout. Donc, les types de propriétés sont différents. On a prévu que dans un avenir très proche, il y aura une étude spéciale qui sera intitulée « Etude sur l’harmonisation des législations foncières dans l’Uemoa » et dont l’objectif est de voir dans quelle mesure ces types de propriétés différents, observés dans chaque pays, après comparaison, seront utilisés pour faciliter le travail de la Caisse régional de refinancement hypothécaire. Les objectifs de cette caisse, c’est de trouver l’argent moins cher sur le marché pour les banques. Donc cela veut dire que les banques vont continuer à faire le crédit au logement en plus grande quantité et sur des durées toujours plus longues.

Quelles sont les mesures d’accompagnement pour le développement des marchés hypothécaire ?

Elles sont nombreuses. Il y a beaucoup de choses à faire encore pour que le marché hypothécaire régional puisse bien se développer. On a prévu qu’une étude spéciale va s’occuper de cela aussi.

Par exemple, comment faire pour que les garanties soient les mêmes dans les pays de l’Uemoa. C’est quelque chose qu’on va étudier. Par exemple, comment on pourra proposer de nouveaux produits d’investissement ou améliorer le fonctionnement du marché hypothécaire. On va étudier tout cela. Quelle va être la bonne fiscalité appliquée aux opérations sur le marché hypothécaire ? On va aborder toutes ces questions dans cette étude-là.

Quels sont les types de créances hypothécaires éligibles au refinancement de la Crrh-Uemoa ?

Aujourd’hui, on a dit que cette caisse va accepter comme créances à refinancer, les prêts qui sont faits aux particuliers avec une hypothèque de premier rang. On a dit aussi que pour ces prêts-là, celui qui bénéficie du logement doit apporter quelque chose par lui-même comme 10 % quand même et que le montant du remboursement ne doit pas dépasser les 33 % de son revenu, c’est ce qu’on appelle la quotité cessible. On a dit aussi que pour pouvoir demander 100 de refinancement, la banque doit apporter 120 et que le prêt qui est consenti, le prêt qui est fait aux particuliers, c’est un prêt que le particulier prend en totalité. Il mobilise tout en même temps. Comme ça on sait que vraiment il doit tel montant ; Et il y a beaucoup d’autres conditions aussi pour être sûr que la caisse va travailler dans un environnement sûr. Ça c’est très important.

Comment la Caisse compte sécuriser ses opérations de refinancement ?

On a fait beaucoup de garanties pour sécuriser cette opération-là. Comme je vous disais tout à l’heure, les crédits que la caisse va distribuer ou financer, doivent être des crédits de bonne qualité. Les banques qui auront la possibilité d’apporter ces crédits-là, ce ne sont pas toutes les banques, ce sont des banques qu’on va choisir parce qu’elles sont bien gérées déjà, parce qu’elles suivent toutes les recommandations de la Bceao, parce qu’elles distribuent le crédit hypothécaire dans de bonnes conditions, parce qu’elles ne font pas n’importe quoi.

Ce sont des banques qui seront contrôlées aussi régulièrement par la Caisse elle-même que par la Commission bancaire. Donc, on a mis beaucoup de contrôle autour de cela.

C’est un financement qui apporte beaucoup de garantie, parce que ce sont les professionnels qui se réunissent au capital de la caisse et qui décident de la qualité des créances qui sont remboursées. Donc, la caisse ne prend pas d’argent pour le travail qu’elle fait pour les banques. C’est un service qu’elle rend à toutes les banques. Il n’y a pas de marge du tout dans ces opérations.

La préoccupation de la Boad, c’est d’abord de créer un instrument qui soit consensuel, efficace pour les besoins des banques et des établissements financiers de l’Union et elle a décidé aujourd’hui de prendre une participation maximum de 25 %. Le capital social de cet établissement financier est fixé à 3 milliards de Fcfa. Shelter-Afrique a investi 1 million de dollars, soit 15% du capital. Les 60% restants sont ouverts aux autres investisseurs, notamment les institutions de crédit hypothécaire des pays de l’Uemoa.

Cela veut dire que, si demain les banques prennent plus que 60 ou 80 % du capital, la Boad va leur céder un peu plus encore de participation. Ce que nous essayons de faire, c’est d’aider la Caisse à naître, à s’établir et à fonctionner dans de bonnes conditions. C’est ce que nous essayons d’abord de faire.

Les délais prescrits pour la réalisation de ce projet de caisse régionale de refinancement ne vous semblent- ils pas assez courts ?

Comme je vous disais tout à l’heure, on a proposé trois instruments : la sécurisation, les obligations de sécurité et la caisse.

Comme le Conseil des ministres va approuver en mars prochain les textes qui vont dire comment on peut faire la titrisation et les obligations sécurisées dans l’Uemoa, nous au Boad, nous essayons de faire en sorte que notre Conseil d’Administration puisse se prononcer également sur la Caisse régionale de refinancement hypothécaire et que d’ici la fin de l’année, nous ayons la première opération de la Caisse. Ainsi, en 2010, tous les trois instruments seront prêts.

Êtes-vous convaincus que les banques vont vous accompagner dans ce projet de financement du logement ?

Vous savez, c’est d’abord elles qui vont gagner de l’argent avec cette Caisse. Parce que les crédits qu’elles ont déjà faits, elles vont les apporter à la caisse qui va emprunter sur le marché avec la garantie de ce portefeuille de crédit que les banques ont déjà fait et dont elles vont transférer la propriété.

Comme la caisse va leur redonner de l’argent, les banques vont continuer avec l’argent qu’elles vont récupérer à faire de nouvelles opérations. Donc elles vont gagner plus d’argent encore. Pour l’instant, c’est le logement qui nous intéresse, c’est le logement qui est le plus gros problème des Etats de la sous-région et c’est pour financer le logement que les banques manquent beaucoup d’argent.

Entretien réalisé par Mamadou SY

lesoleil.sn

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