Le vieux scénario a une nouvelle fois été sorti des tiroirs pour être appliqué à la Libye de Khadafi ; on s’est brusquement aperçu, après plus de 40 ans, que cet homme est un tyran sanguinaire, un ogre buveur du sang de ses concitoyens. On l’a provoqué, poussé à la faute. On a rameuté à la hâte le prétendu Conseil de Sécurité de l’ONU, et voté une loi, la 1793, très consensuelle : zone d’exclusion aérienne, pas de troupes au sol, pas d’assassinat du Guide de la Révolution libyenne.
Certains se sont mis en avant, ont joui d’une exclusivité de frappes aériennes pendant deux jours – dame, ça permet de prouver au monde entier qu’on a les meilleurs avions, les meilleurs missiles et que tout le monde a tort de ne pas vous les acheter …
Puis on a commencé les dérives savamment « vendues » à l’opinion publique nationale et internationale. On a fourgué la guerre à l’OTAN, en procédant à une substitution que rien ne devrait permettre : l’ONU n’a pas donné mandat à un quelconque groupe de pays, où à une association régionale fermée, pour mener en son nom les frappes sur la Libye, sur les villes, sur les palais ou sur les bureaux de Khadafi. Que cherche-1- on, quand on bombarde sciemment (« chirurgicalement »), des bureaux ou des résidences où on sait que quelqu’un est censé travailler ou dormir ? N’est- ce pas là ce qu’on appelle des tentatives d’assassinat ? On envoie des troupes au sol, rebaptisées « encadrement technique », qui guident les frappes au laser. On envoie des drones, ces armes de lâches, qui tuent indistinctement combattants et petites filles de cinq ans, vieux hommes de soixante – quinze ans et jeunes hommes de vingt ans.
On va consciencieusement détruire ce que le peuple libyen a bâti au prix de nombreux sacrifices. On finira par avoir Khadafi, dans trois mois ou trois ans. Et on se bousculera au portillon pour reconstruire à coups de milliards de dollars ce qu’on avait construit contre des espèces sonnantes et trébuchantes. Et, ma foi, il n’y a pas de petits profits, on aura fait travailler l’industrie d’armement des Etats alliés, car il faut de temps à autre une bonne petite guerre non seulement pour permettre aux « boys » et autres « légionnaires » de faire un peu d’application « sur le terrain », mais encore d’utiliser (de tester) certaines nouvelles armes.
Khadafi a peut – être mérité ce qui lui arrive. Il a trop souvent provoqué l’Occident, les potentats arabes alliés de l’Occident, et méprisé, malgré ses discours panafricanistes, ses pairs nègres et ceux des leurs qui se sont laissés attirer chez lui par des propos lénifiants. Les Noirs africains ont souffert en Libye de racisme, d’exploitation et de précarité. Et jusque sous les bombes de ses clients de l’UE, en même temps qu’il les voue aux gémonies et les appelle au cessez- le – feu et au dialogue, il continue à manifester son racisme (largement partagé par la plupart des siens) envers les Nègres, en se proclamant « rempart » de l’Europe contre l’envahissement des Africains du Sud du Sahara et contre Al Qaïda. Tout cela est vrai, et fait que peu d’Africains pleureront leur «Roi des rois » quand on l’aura pris ou tué. Mais, tout de même, la communauté internationale n’a pas le droit de passer par le mensonge, la tricherie, la manipulation des esprits, pour parvenir à des fins même justes, ni surtout à des fins que rien ne justifie vraiment. Tuer Khadafi par des drones sans autre forme de procès, ce serait violer la légalité internationale.
On arguera de l’attention et des palinodies de la CEDEAO dans le cas ivoirien. Mais ce serait oublier que si la CEDEAO a été fondée à prendre des mesures coercitives contre le régime de Gbagbo (sans d’ailleurs les mettre en application), c’est que la Côte d’Ivoire est membre de la CEDEAO, et a voté et ratifié les textes communautaires qui permettent de telles mesures contre tout Etat qui viole ses lois internes ou les lois internationales. L’OTAN, que je sache, n’englobe pas la Libye …
Que font les autres membres de la communauté internationale ? Et que font les Chefs d’Etat africains, face à une entreprise de gangsters et de flibustiers qui, méthodiquement, sont en train de concasser un pays, un peuple, des hommes qui ne leur ont rien fait ? Se taire, Messieurs les Présidents, et vous aussi, militants des droits de l’Homme, c’est se faire objectivement le complice de ces nouveaux conquistadores mâtinés de croisés (M. Guéant dixif). Il faut que cela cesse, et tout de suite. Il faut arrêter les nouveaux Barbares !
Il faut, et c’est urgent, que l’on dise son fait à cette OTAN qui, depuis la fin de la guerre froide, s’est reconvertie en une organisation Terroriste Anti – Nations insoumises à ses quatre volontés, en une coterie d’Etats puissants et prédateurs, où le coffre – fort a pris la place du cœur et de la raison, et ou les missiles téléguidés, ont remplacé l’expression d’amour. Il est absolument scandaleux que l’OTAN se mette en mission pour le compte de la communauté internationale, sans aucun mandat clair de l’ONU, au nom de valeurs que les pays qu’elle regroupe (les Etats, pas les peuples, encore que certains ressortissants tendent de plus en plus
à être et à affirmer ouvertement racistes) sont très loin d’incarner au premier rang desquelles les Droits de l’homme dont elle se gargarise continuellement et nous rebat les oreilles. L’OTAN c’est, à l’échelle des Nations, un ramassis de gangsters prêts à tout (meurtres, chantage, rackets, destructions de toutes sortes).
Oui, décidément, il faut arrêter les nouveaux Barbares !
On a mis Césaire au Panthéon. Mais a-t-on bien lu son œuvre ?
L’auteur du Discours sur le colonialisme (1955) a dit : « Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde ».
Et le même Césaire, dans son poème « Et les chiens se taisaient » (1946) a écrit : « Architecte aux yeux bleus je te défie
prends garde à toi architecte car si meurt le Rebelle ce ne sera pas sans avoir fait clair pour tous que tu es le bâtisseur d’un monde de pestilence [où] chacun de tes pas est une conquête et une spoliation et un contresens et un attentat (…) ton monde de viol où la victime et par ta grâce une brute et un impie ».
On ne saurait mieux caractériser la situation actuelle.
Prof. Amadou LY FLSH /UCAD de Dakar [email protected]
Très bonne analyse. Merci professeur!
tres bien dit grd Ly .
je suis d’accord . et votre commentaire me pose la question de notre place à l’ONU . et puis est ce qu’on a les predidents qu’ils nous faut ?
MERCI DE TTES LA FACONS