Mcc, homosexualité, Sénégal : Ôtez-nous de ce doute, Monsieur le Président ! Par Amadou Tidiane Wone Ecrivain, Ancien Ministre, Ancien Ambassadeur

Vous venez de passer un an à la tête de notre pays, par la Volonté de Dieu et l’ardent désir des sénégalais de changer de cap. Nous vous souhaitons de répondre à leurs espérances, si grandes et si urgentes, dans la paix et la prospérité.

Cela dit, des rumeurs persistantes font état de l’imminence de l’adoption par le Sénégal de lois consacrant les droits des homosexuels. Aucune voix autorisée n’ayant, jusqu’ici, édifié l’opinion sur la véracité ou non de ces allégations, je m’adresse à vous, solennellement, sur la base des éléments troublants suivants : Un article intitulé « US Leadership to Advance Equality for Lesbian,Gay, Bisexual and Transgender People Abroad » publié le 13 décembre 2012 par Samantha Power , alors Conseillère Spéciale du Président Barack OBAMA, sur le site officiel de la Maison Blanche : http:/wh.gov/R8Su a, tout particulièrement, retenu mon attention dans le contexte des rumeurs évoquées plus haut.
Dans cet article, long et instructif, les grandes lignes de la stratégie des autorités américaines en vue de diffuser une vision du monde qui leur est propre, sont exposées. Samantha Power une voix autorisée, elle, nous dit : « I described how advancing the human rights of lesbian, gay, bisexual and transgender (LGBT) people around the world is central to, not separate from, our comprehensive human rights agenda. » En substance elle affirme que, faire avancer la cause des droits des lesbiennes, des homosexuels, des bisexuels et des transsexuels partout dans le monde est central et inséparable de la perception américaine des droits de l’Homme et de leur agenda politique .
Je lui reconnais le droit d’avoir cette opinion et de la défendre. Je respecte le droit du Peuple américain à se doter de toutes les lois qu’il estime utiles à son bien-être.
Je refuse cependant le droit, à quiconque, de nous imposer sa vision du Monde et ses valeurs, quelles qu’elles soient.
Nous venons de célébrer le 53ème anniversaire de notre accession à l’indépendance. Et vous disiez dans votre adresse à la Nation : « La fête nationale évoque d’abord le souvenir impérissable de nos Résistants ; héros connus ou anonymes, qui ont sacrifié leur vie pour la sauvegarde de notre liberté. » La liberté n’a donc pas de prix. La dignité et la défense de nos valeurs non plus. Car, plus loin, vous ajoutez : « Et c’est à cela que je vous invite, mes chers compatriotes ; au nom de notre histoire partagée, au nom des valeurs qui nous rassemblent ; et au nom de notre destin commun, pour que vive le Sénégal, debout, et en marche vers le progrès, dans une Afrique unie et prospère. »
Si j’ai évoqué tout ce qui précède c’est pour mettre en contexte l’objet de la présente et vous faire part de mon trouble.
Dans votre adresse solennelle à la nation, vous avez cité une entreprise américaine indépendante, le Millénium Challenge Corporation, en ces termes : « D’autres projets, à forte intensité de main d’œuvre, dont ceux du Millénium Challenge Corporation, et des pistes rurales, sont à différentes phases de réalisation. » Je me demande encore ce que vient faire, dans le discours du Chef de l’Etat à la nation sénégalaise, le nom d’une entreprise américaine d’autant que celle-ci, aux termes de l’article de Samantah Power, a une feuille de route claire : « The Millennium Challenge Corporation (MCC) has made clear that protecting the human rights of all people, including Lesbian, Gay, Bisexual and Transgender persons, is part of the overall human rights and governance criteria on which countries will be assessed for compact eligibility. Millenium Challenge Corporation has been very explicit in communicating with governments that removing anti-LGBT laws is an important factor in assessing human rights and governance performance. »
En un mot, Samantha Power affirme que l’un des critères d’appréciation en vue de l’éligibilité d’un pays à l’accès aux fonds du programme du Millenium Challenge Corporation, est de nettoyer son arsenal juridique de toute loi réprimant l’homosexualité et l’adoption de lois protégeant les droits des lesbiennes, homosexuels, bisexuels et transsexuels.
Samantha Power a le droit de penser ce qu’elle veut. Elle a le droit de conseiller à son patron de Président ce qu’elle pense juste et bon pour l’Amérique. Je n’en veux vraiment pas à Samantha Power.
Cependant, comme citoyen libre d’un pays indépendant, je revendique le droit de refuser que l’on m’impose, sous le couvert de financement d’infrastructures dont nous avons certes un grand besoin, une vison du Monde qui insulte nos valeurs et piétine notre identité profonde comme Peuple et comme Nation.
C’est pour cela que je m’adresse à vous, en premier ressort, afin que vous ôtiez le doute qui, lentement, pernicieusement, s’insinue dans l’esprit de la plupart de nos compatriotes. Vous êtes, par la Grâce de Dieu, le Chef de l’Etat, Chef Suprême des Armées, Gardien de la Constitution. Vous êtes celui qui symbolise l’unité et la cohésion de la nation sénégalaise. C’est à vous seul que je m’adresse en raison de l’extrême gravité de l’Heure.
Face à une montée des périls, sur ce sujet d’une extrême sensibilité, il est du devoir de chaque citoyen de prendre clairement position. Et je dis pour ce qui me concerne : les Droits de Dieu sur Sa Création passent avant tous les autres droits. Sous ce rapport, le Sénégal est composé majoritairement de croyants : musulmans et catholiques. Ces deux composantes de notre nation réprouvent l’homosexualité en raison de leur respect des principes directeurs de leur Foi. Que fait-on des droits de cette majorité ? Ouvrons le débat dans la transparence ou fermez le définitivement. Votre autorité en a le privilège. Mais de Grâce, ôtez-nous de ce doute…
Je vous prie de croire, Monsieur Le Président de La République, à l’assurance de ma très haute et très respectueuse considération.

Amadou Tidiane Wone
Ecrivain, Ancien Ministre, Ancien Ambassadeur
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