Quartiers des lutteurs : Fass cherche son « Tigre »

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Aujourd’hui, Fass cède du terrain parce qu’opposé à des écuries beaucoup plus conquérantes. Et pourtant, les différents responsables de ces entités, qui impriment leur marque dans l’arène, ont fourbi leurs armes dans ce quartier avant de se mettre à leur propre compte. Jadis lieu qui vivait au rythme des « mbappats » (soirées de lutte traditionnelle) et regroupait les lutteurs de toutes les ethnies qui venaient pour la première fois à Dakar, Fass  a perdu de sa superbe. Néanmoins, des stratégies sont en train d’être mises en œuvre pour reprendre du poil de la bête et permettre à cette cité de scintiller à nouveau dans l’univers de la lutte.

Les  pluies de la veille avait fini par rendre certaines parties du quartier difficilement praticables. Mais, cet état de fait n’empêchait en rien Ousmane Diop et ses amis mécaniciens de se présenter au boulot. Dans leur tenue de travail, ils essayaient de faire démarrer une voiture qui toussotait à l’allumage. Ces jeunes de Fass ne savent pas que leur atelier de mécaniciens fut jadis l’arène Emile Badiane. Mieux, c’était le « Lambu Diola »  du nom d’une ethnie dans le sud du pays. « J’en ai entendu parler. Mais bon, c’était il y’a très longtemps », nous dit Ousmane Diop. Comme lui, beaucoup de jeunes ne savent de Fass que le présent. Parfois, ils se font raconter des bribes d’histoire de ce lieu qui fut jadis l’un des plus prestigieux. Un quartier qui vivait au rythme des mbappats (soirées de lutte traditionnelle).

 

Un fief, plusieurs ethnies et lutteurs

 

Durant cette période, les soirées de lutte traditionnelle étaient la distraction la plus prisée par les populations. Et c’est ainsi que durant  les week-ends et même parfois la semaine, « au gré des roulements de tam-tams, nous allions suivre les séances nocturnes de lutte traditionnelle », a soutenu, nostalgique, la dame Fanta Diop. Au-delà de cette arène, Fass englobait le « Lamb Toucouleur » (en face des Travaux communaux), les arènes Robert Delmas, un autre « Lamb Diola » à  Fass Delorme. Mais le plus important de ces antres, rappelle Séni Fall, un quinquagénaire de la localité, est sans conteste « les arènes sénégalaises à Fass Casier, lieu où se sont déroulés tous les grands combats qu’abritait l’arène ». Un endroit qui, selon lui, appartenait à Mbaye Samb Mandéla, un dignitaire du quartier.

Au début, la notion d’écurie n’était pas très répandue. Dans Dakar, il y avait, entre autre quartiers, Centenaire, Sicap, Grand-Dakar et Médina. A côté, Fass-Paillottes avec ses baraques qui brûlèrent en 1985. Avant l’incendie, cet espace était insalubre et insécurisé. Dans ce quartier populeux, venaient se cacher certains brigands. Aussi, était-ce le lieu qui logeait beaucoup de personnes qui venaient, pour la première fois dans la capitale. Fass-Paillotte était à la périphérie de la ville avec sa promiscuité ambiante. C’est le plus naturellement du monde que des lutteurs s’y sont fait héberger à leur arrivée à Dakar. « Ils se sont abreuvés à la source Fass, avant d’aller créer leur propre structure », a raconté Faga 2, une ancienne gloire de Fass.

Souvent, on parle de cette partie de Dakar comme étant la mère des écuries, celle qui a engendré beaucoup de lutteurs qui ont fini par mettre sur pied leur propre structure. Dans ses rappels, Séni Fall se souvient des lutteurs mandingues comme Balla, Djengol, Baba Diawara, Falaye Baldé, Fodé Doussouba et Bouki. Chez les Toucouleurs, il y avait un coriace athlète du nom de Racine Kelly. Quant à Manga 2, « roi des arènes », il se préparait à Fass Delorme. Tout cela donnait à cet endroit les allures d’une cité cosmopolite, véritable repaire de champions.

Fass a également accueilli Double Less, Mor Nguer, Pape Touré de Mbour, Faga 1 et Faga 2, Toubabou Dior, Amadou Katy Diop entraineur de Yékini et Mbaye Cissé, tous deux de l’écurie Ndakaru, les frères Sadio Camara et Guèye Camara, Boy Bambara, Cheikh Mbaba et tant d’autres champions.  Cette diversité, avec ces lutteurs venus d’horizons différents, était une chance pour les combattants qui avaient la possibilité de se frotter entre eux, mais aussi d’échanger leur expérience dans les techniques de lutte.  L’ancienne gloire  Faga 2 se souvient des circonstances qui ont amené les lutteurs sus cités à fréquenter Fass : « Toubabou Dior, Birahim Ndiaye, Mor Nguer et Ambroise Sarr sont venus ici grâce à Mbita Ndiaye, ancien lutteur de Fass et responsable de sa propre écurie à Yarakh, qui les avait déjà battus lors des « mbappats ». Quant à Double Less, il est arrivé à Fass par le truchement d’un certain Serigne Cissé,  marabout locataire chez Mbaye Guèye.

 

Fass, le dernier de la classe

 

« De fil à aiguille, ce bel athlète, qui était ami avec les frères de Mbaye Guèye, a demandé à s’entraîner à Fass où Mbita Nadiaye, Alioune Diaw, Mansour Samb et Mansour Mbodj lui ont beaucoup appris », se souvient Faga 2. Quelques temps après, à cause de son gabarit et de son courage, Doudou Diagne, propriétaire d’une grande structure, l’a recruté comme portier.

Aujourd’hui, la banlieue dicte sa loi à Fass qui suit difficilement la cadence imposée. Gris-Bordeaux, l’actuel « Tigre », collectionne les revers. Et pourtant, il fut un temps, pendant les après-midi de victoire, le marché de Fass et la demeure de « l’Enfant chéri de Dakar », Mame Gorgui Ndiaye, étaient les points de convergence de milliers de fans célébrant, avec faste, les victoires. Les supporters s’y retrouvaient après chaque succès de Moustapha Guèye ou Gris-Bordeaux. « Hélas, ce ne sont que des souvenirs maintenant », reconnait  Doudou Diop, un jeune féru de lutte.  Cette mauvaise posture s’explique, selon lui, par le fait que les lutteurs des autres localités sont aguerris et plus motivés. « Pour renaître, Fass doit unir ses forces et éviter les tensions. Que l’on tienne compte de l’expertise de chacun. A défaut, on va s’enfoncer davantage», pense Faga 2.

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