Révisions Constitutionnelles La Dictature Du Prolétaire

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Le Conseil constitutionnel saisi le 19 janvier dernier révisera certainement l’architecture techniqueprésentée par le président de la République dans son projet  de révision constitutionnelle : les dispositions proposées conduisent tout droit à une dictature qui ne dit pas son nom avec un verrouillage systématique qui ne donne aucune autre alternative au citoyen.Sur les principaux points en effet, notamment sur la procédure d’élection et de durée du mandat du président de la République et sur la forme républicaine, la laïcité, le caractère indivisible, démocratique et décentralisé de l’État, M. Macky Sall ne laisse aucune alternative actuelle quand il affirme que « cet  article ne peut être l’objet de révision« .
Le texte de la révision constitutionnelle libéré le 18 janvier dernier porte sur 15points fourre-tout que les analystes estiment être un package devant contenter tout le monde ; il est tout à la fois ambigu par certains endroits, superfétatoire en d’autres, enfin tyrannique, quand une tonalité générale et dogmatique ne veut tenir compte d’aucune historicité sociologique de la Loi, de son évolution, de son intemporalité et de son caractère impersonnel.
Défenseur de la veuve et de l’opprimé, justicier voulant redonner au citoyen lambda sa dignité dans le partage des droits dans la cité et des richesses de la Nation dans un discours itératif de luttes contre l’exclusion sociale,Macky Sall se présente aussi comme le prolétaire imposant sa dictature  en faisant payer les riches…et les adversaires, tout en se donnant l’allure du parfait gentleman. Il ramène en effet tout à lui et à lui seul, parfois par la ruse d’un oubli volontaire(mode d’élection du président de la République au scrutin majoritaire à deux tours) ou intuiti personnaequand un bout de phrase règle un problème ponctuel lors même que la loi et impersonnelle et intemporelle (« cette disposition s’applique au mandat en cours » ; quid alors du prochain chef de l’Etat…s’il n’est pas l’actuel ?-Du Président de la République (art.26-art. 52).
MACKY SALL A PAS PLUS D’UN TOUR DANS SON SAC
Le mode de scrutin pour l’élection présidentielle et la durée du mandat sont le premier signe d’une ambiguïté qui laisse à penser que l’initiateur du projet de révision constitutionnelle oublie qu’en Afrique, le second mandat n’est pas un enjeu majeur. Élu en tout cas grâce aux 26% du premier tour, Macky Sall vaut en valeur intrinsèque 15%, renforcés par les onze pour cent de la coalition « Macky 2012 ; les contraintes auxquelles les populations sont confrontées ne lui ont permis de décrocher une majorité lors de joutes électorales : législatives de juillet 2012, locales de juillet 2014. « Sauter » un tour pour essayer de se faire élire semble donc de bon aloi. L’explication d’une élection souvent réussie au premier tour pour justifier l’exclusion du second tour ne tient pas la route : le Sénégal a toujours voté pour les deux tours, même si, rarement, un seul tour aura suffi, comme en 2007 et à la surprise générale, comme le reconnaissait Me Wade lui-même ;se prévaloir de la période du parti unique pour regretter les scores soviétiques n’honore pas la lutte des populations sénégalaises pour l’élargissement des libertés individuelles et collectives entamées dès 1968.
Ceci n’est pas la seule incongruité. La copie servie sur ce chapitre déterre un cadavre liquidé par le congrès du parlement en sa séance du 19 septembre 2012. La loi 2012-16 du 28 septembre 2012 portant révision de la constitution liquidait en effet une station qui avait valu l’historique mouvement despopulations du 23 juin 2011 relatif au combat contre le poste de vice-président. Le nouveau pouvoir issu de la présidentielle de 2012 s’est empressé de liquider l’objet du délit, pour le reconduire dans le projet du 18 janvier dernier.
«L’article 3  de la loi du 28 septembre 2012 stipule que «Le poste de Vice-pre?sident pre?vu par l’alinéa 2 de l’article 26 de la Constitution est supprime?. En conséquence, les articles 26 et 50 sont modifiés ainsi qu’il suit :
Article 26 : sont abrogés les trois derniers alinéas. Article 50 : après « certains pouvoirs» supprimer les mots « au Vice -pre?sident »  La loi a e?te? promulgue?e et publie?e au
Journal officiel n° 6688 du vendredi 28 septembre 2012 par vos soins », rappelle, pince sans rire, Doudou Wade. Le pouvoir, pris,  a versé dans la casuistique, versant entre abrogation et validité des propositions de changements soumises.
LE PROJET EST SUPERFÉTATOIRE PART ENDROITS
Les modifications envisagées donneront une nouvelle constitution votée et promulguée. Elle aura force de Loi et entrera en vigueur ; elle substituera en temps et lieu à l’ancienne. Les exégèses ne s’entendent pas sur l’aspect superfétatoire de la rétroactivité : pour certains, il s’agit de modifications, pour d’autres de continuité sur un mandat déjà entamé mais qui portait sur 7 ans, d’où la nécessité de préciser qu' »elle s’applique au mandat en cours« . Cette temporalité est une faiblesse de la loi qui règle un problème ponctuel (pro tempore) alors que la durée est entrée de jure etde facto en vigueur avec la promulgation de la nouvelle Constitution amendée par les changements votés par référendum. En d’autres termes, la Loi fondamentale amendée après approbation par référendum reste la seule valable et s’applique dans toute sa rigueur et dans toute sa rigueur.
LE PROJET EST TYRANNIQUE
Never Say Never
Enfin, le projet de réformes constitutionnelles est tyrannique lorsque, dans une démarche à la«Yadicone», Maky Sall veut faire payer les riches dans un populisme de gauche qui demande aux populations de prendre en mains leurs richesses physiques, matérielles et morales. L’allusion à la moralisation générale de la société sénégalaise par des introspections dans le régime politique, la bonne gouvernance et la consolidation l’État de droit et la démocratie semble pêcher par l’exemple vécu à date d’une déstructuration du tissu social, tant au niveau économique, politique, culturel que social ; l’Eldorado promis par laminage social est l’utopie qui a fait le lit de dérives graves dans des sociétés castratrices où l’on, prétendu faire le bon heur des populations contre leur gré. Le ton général est d’ailleurs donné par la forme dogmatique de l’article qui ne peut faire l’objet de révision  et par l’Omerta recherché dans toutes les couches socio-politiques. Senghor, Diouf et Wade ont été plus humbles qui se sont mis en perspective pour laisser les populations sénégalaises apprécier leur évolution et les normes et valeurs qu’elles veulent se donner en toute liberté. La France de François Hollande empêtrée  dans le terrorisme veut modifier sa Constitution pour la mettre au niveau.
Pathé MBODJE, M. Sc, Journaliste, sociologue

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