Tivaouane, ville du Gamou, du savoir et du ressourcement spirituel

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Un autre regard sur Cheikh El Hadj Malick SY, l’éminent  »Homme de Dieu » et l’éternel disciple et serviteur de son maître !!!

En dépit de sa vaste érudition et de ses dons mystiques avérés, Cheikh Seydi El Hadj Malick SY (Maodo)  avait choisi d’être disciple de Cheikh Ahmad TIDJANI Chérif et souhaité de mourir et d’être ressuscité en tant que tel ; oui, il avait toutes les qualités et dispositions pour créer sa propre voie, mais il avait préféré être sous la tutelle d’un éminent ‘’Homme de Dieu’’, un Saint d’un rang exceptionnel, et d’être promis comme un substitut (vicaire) digne de confiance devant les hommes de sa génération ; ainsi, Cheikh Seydi El Hadj Malick SY (Maodo) n’a jamais envisagé son ascension en dehors de la Tidjaniya ; dès lors, il n’était qu’un maillon d’une longue chaîne  (généalogie) spirituelle (silsila) et ne pouvait que jouer la partition qui lui était assignée ; bref, il n’était qu’un disciple et serviteur qu’Allah avait comblé de bienfaits, en lui conférant le statut de ‘’khalife de Cheikh’’ et donc de pôle (khutb) détenant une ‘’autorisation spéciale’’ (idznu’l khass) pour appeler les hommes sur le chemin d’Allah . Ainsi, son allégeance à Cheikh n’était point le fait d’un complexe d’infériorité par rapport à une race – fusse-t- elle celle du Prophète (PSL), mais le fait d’un choix divin, d’une faveur divine ‘’imméritée’’. En vérité, en souscrivant à la Tidjaniya, Cheikh Seydi El Hadj Malick SY (Maodo) avait accrédité son vénéré maître, Cheikh Ahmad TIDJANI Chérif (1737-1815) qui s’était proclamé solennellement comme le « Sceau des Saints » (al khatima’l wilâyah) et annoncé que le Mahdi attendu à la fin des temps sera son disciple ; il s’était donc engagé, et en connaissance de cause, dans cette perspective ; dès lors, il ne pouvait être qu’un précurseur du Mahdi, en conformité aussi avec la prédiction  de son maître Cheikh El Hadj Oumar Foutiyou TALL  qui avait déclaré qu’il ‘’reviendra en Mahdi, continuer autrement la guerre sainte que j’avais commencée avec les armes’’ ». Et donc du fait de cette perspective intangible, Cheikh Seydi El Hadj Malick SY ne pouvait être qu’un moyen ; certes, une étape décisive, mais pas une finalité, si on place sa mission dans celle de Cheikh qui est partie intégrante de celle du Prophète (PSL). Oui, Cheikh Seydi El Hadj Malick SY était un précurseur (un père spirituel)  du Mahdi – qui selon le Prophète (PSL) n’est autre que Jésus fils de Marie (Rapporté par Al-Hâkim) – ; et ce n’est qu’ainsi perçu que l’on peut entrevoir la véritable dimension de Cheikh Ahmad TIDJANI Chérif et d’appréhender les véritables enjeux de sa mission christique dans l’Islam, en cette ‘’fin des temps’’ (akhirou zamân). Au vu de tout cela, il est nécessaire de relire la vie et l’œuvre de Cheikh Seydi El Hadj Malick SY dans cette perspective, afin d’introduire toutes les ruptures et réaménagements qui s’imposent ; ainsi, le Gamou [commémoration de la naissance du Prophète (PSL)] dont il fut le promoteur, et qui n’est guère l’essence de sa mission, doit être repensé dans une perspective de décentralisation la plus totale possible (dans tous les pays, villes, mosquées et foyers familiaux).

Dr Mouhamadou Bamba Ndiaye

Tivaouane, ville du Gamou, du savoir et du ressourcement spirituel

 

Par Dr. Bakary SAMBE

Dès que le croissant lunaire de Rabî’ al –awwal détrône celui de Safar, tous les regards, mais aussi, tous les cœurs se dirigent vers Tivaouane, cette ville- Lumière où la Burdah l’œuvre d’Al-Bûsayrî retentit pour rendre hommage au Prophète de l’Islam. Mais qui, dans le monde musulman, aurait entendu parler de cette bourgade de la plaine du Cayor, pendant longtemps, réduite à sa seule gare (7ème ) si, en 1902, un fils de Gaya, El Hadji Malick Sy, ne s’y était pas installé afin de perpétuer l’enseignement de Sayyidunâ Muhammad (PSL) ?

Il faut donc rendre à César ce qui lui revient !

Cheikh El Hadji Malick Sy a très tôt connecté cette ville aux grandes capitales de l’islam. Le nom de Tivaouane est désormais célèbre, de Fès l’impériale au Caire, du Liban à l’Arabie Saoudite, disons tout simplement du Golfe à l’Océan. Cette œuvre fut initiée de longue date ! La ville de Fès, capitale de la Tijâniyya qu’il a, sa vie durant, rêvé de visiter et dont il a hérité des secrets, eut tôt fait d’envoyer ses plus illustres muqaddams dans la cité de Maodo où il a accompli un travail inestimable.

Déjà, son séjour mauritanien, auprès du Cheikh Muhammad Ali en fera un personnage célèbre sur la rive droite du fleuve Sénégal. En plus de ce court séjour, Cheikh El Hadj Malick, profitera de son voyage à La Mecque pour nouer des liens dans le monde arabe.

Il voulut saisir l’occasion de ce voyage vers La Mecque, en 1889, pour faire un détour à Fès afin de se recueillir sur la tombe d’AÎmad Tijânî. Ce vœu ne s’est pas réalisé dans ce monde profane, jusqu’à sa mort en 1922. Il fut, par ailleurs, un grand ami du Cheikh Mawlûd Fall, disciple de Cheikh Muhammad al-Hâfiz et d’autres notables et grands muqaddams.

La personne d’El Hadj Malick est incontournable dès lors qu’il s’agit de la Tijâniyya au Sénégal et surtout en pays wolof. Il a contribué de manière considérable à la propagation de la confrérie à l’intérieur du Sénégal. Si El Hadj Omar Tall est l’apôtre de la Tijâniyya dans la sous-région ouest-africaine, El Hadj Mâlick, lui, a été pour beaucoup dans sa vulgarisation à l’intérieur du Sénégal. En tous cas, les témoignages sur la vie de Moulay Ali al-Kathirî, un originaire de Fès, indiquent l’intérêt de Tivaouane pour les sciences islamiques et les ouvrages qui y sont consacrés. Le Professeur Rawane Mbaye qui s’est penché sur cette œuvre au sens inépuisable, considéra la pensée d’El Hadji Malick Sy comme un véritable « pôle d’attraction entre la Sharî ‘a et la Haqîqa » !

L’attachement incontesté de Maodo à Cheikhna Ahmed Tijânî fut tel qu’il vouait un respect profond à la ville de Fès et à ses ressortissants. Mais, à défaut de pouvoir effectuer ce voyage de Fès, il entretiendra des relations constantes avec la Zâwiya-mère et son muqaddam. Il l’invitera, d’ailleurs, dès 1914 à venir visiter Tivaouane, capitale de la Tijâniyya sénégalaise. Cheikh El Hadji Malick reçut les ijâzât de Seydi Ahmad Sukayrij et du Muqaddam Ahmad al-‘Abdalâwî. Malgré cela, son désir de visiter Fès est resté intact et se perçoit dans ses poèmes dédiés au fondateur de la confrérie donnant une place importante à la ville de Fès (voir fala budda min shakwâ ilâ-l-lâhi kurbatî). Il l’exprime en des termes très émouvants et affirme son « amertume » si toutefois, il ne se rendrait pas auprès de Cheikhna Ahmed Tijânî : Wa mâ ziltu arjûhâ mina-l-lâhi wahdahû / wa in lam analhâ fayâ marârata ‘îshatî).

Les relations entre la Zâwiya de Fès et celle de Tivaouane, ainsi initiées par El Hadj Malick Sy, vont être perpétuées par ses successeurs, Seydi Ababacar Sy et El Hadji Abdou Azîz Sy Ce dernier personnage occupera une place importante dans la conception que les tidjânes du Sénégal auront des relations avec le Maroc, considérées, avant tout, comme des rapports bâtis sur le partage d’une même confrérie. Ainsi, le fils aîné et premier calife de Maodo Seydi Ababacar Sy (1922-1957) reçut, au Sénéal, la visite du petit-fils du fondateur de la confrérie Cheikh Muhammad al-Tayyib al-Tijânî en 1948. Cette visite inscrite dans la continuité des rapports entre la famille Sy et le Maroc sera suivie de celle de Sayyid Ben’amar al-Tijânî dès 1951. Rappelons que, de son vivant, El Hadj Malick Sy avait essayé de rapprocher sa famille du Maroc, en l’occurrence son fils aîné, Seydi Ababacar Sy, en lui chargeant, à l’époque, d’organiser la visite et la tournée au Sénégal de cheikh Ahmad ibn Sâ’ih de la branche Tijâniyya de la région de Rabat.

C’est cette même volonté qui se manifesta à l’occasion des visites de 1948 et de 1951 lorsque Seydi Ababacar Sy confia son frère et futur calife El Hadj Abdou Aziz Sy d’organiser la tournée des chérifs Ben ‘Amar et Tayyib al-Tijânî, à travers les villes et villages du Sénégal, pour rencontrer les adeptes de Tarîqa. El Hadji Abdou Azîz Sy effectue une visite mémorable à Fès en 1949.

Rappelons qu’El Hadj Abdou Aziz Sy et Thierno Saïd Nourou Tall seront les deux personnalités religieuses sénégalaises à aller accueillir le Roi Mohamed V du Maroc, lors de son escale à Dakar, sur le retour d’exil de Madagascar. D’ailleurs deux émissaires – et non des moindres – seront présents à Tivaouane suite à la disparition de Seydi Muhammad al-Mansûr Sy, fils d’El Hadj Malick : Sidî Ahmed Tijânî et Chérif Muhammed al-Habîb Tijânî.

Même à la disparition d’El Hadji Malick Sy, en 1922, les rapports entre la ville de Tivaouane et, à travers elle, la communauté tijânie du Sénégal et le Maroc se sont distingués par cette imbrication d’un processus de coopération bilatérale et religieuse pour renforcer les liens historiques entre deux peuples.

Lors de l’inauguration de la Grande Mosquée de Dakar en 1963, El Hadji Abdou Azîz Dabbakh fut désigné pour diriger la prière du vendredi avec deux remarquables sermons prononcés devant Le Roi Hassan II. La construction de cette mosquée fut confié par le Roi du Maroc à son  architecte personnel Gustave Collet.

Ce rayonnement de la ville de Tivaouane demeure une réalité persistante. Récemment en 1998, le khalife général, Serigne Mansour Sy Borom Daaraji fut désigné, lors du grand rassemblement au Tchad, pour prononcer un discours historique en direction de la Ummah islamique. Ce fait s’inscrit dans la particularité de Tivaouane d’avoir toujours été à l’avant-garde du processus de l’internationalisation de l’islam sénégalais. La qasîda qu’il dédia au défunt roi Hassan II, lors des journées Cheikhna Ahmed Tijiânî, fut considéré par le Ministre marocain des affaires islamiques, Abdel Kabir al-Alaoui Madghrî, comme le plus bel hommage qu’il n’ait jamais entendu.

En fait, les efforts de Seydi El Hadji Malick pour l’islam bénéficient d’une large reconnaissance hors de nos frontières. En 1995, la revue égyptienne Al-Azhar, dans une présentation de Seydi El Hadj Malick Sy et de son oeuvre soutenait que « grâce à lui, l’Islam a connu son épanouissement dans ce pays [le Sénégal] en créant des écoles, des mosquées, des zâwiya ». Faisant allusion à sa stratégie éducative, la revue Al-Azhar poursuit son témoignage sur le travail de Maodo : « il a aussi formé de brillants érudits éparpillés dans tous les coins du pays telle l’expansion de la lumière dans l’obscurité »

Ses successeurs et petits fils n’ont pas rompu avec cette tradition. Cheikh Ahmed Tidiane Sy Maktoum, fut, lui aussi, présenté par les Editions Dâr Maktabat al-Hayât de Beyrouth en ces termes : « Il est actuellement parmi les hommes qui œuvrent pour l’intérêt des musulmans et de l’humanité. Il bénéficie de l’estime et de l’amitié sincères de tous les leaders du monde arabe. Ils l’estiment pour sa vision, ses qualités humaines et sa sagesse politique ». C’était lorsque Yahya Haqqi lui demandait de reprendre ses conférences dans un recueil publié et diffusé dans le monde arabe à partir du Liban.

De même Serigne Abdou Azîz Sy Jr, en plus de ses charges comme « l’Ambassadeur de la Tarîqa », avec ses nombreuses tournées européennes et américaines, auprès des talibés, est présent dans toutes les grandes organisations islamiques dont la Ligue Islamique Mondiale, l’Association mondiale de l’Appel Islamique (AMAI) et d’autres Congrès où il représente le continent africain, tout entier. Partout dans le monde des jeunes Tijanes s’inspirent des enseignements de cette Tarîqa Muhammadiya, comme dans le cadre du Forum National sur la Tijaniyya dont la 4ème édition fut tenue à Paris en avril 2008 dans l’enceinte du Palais de l’Unesco. L’édition de Grenoble en 2009 fut le point d’orgue de cet engouement des tidianes qui sont regroupés au sein de la Fraternité Tijaniyya de France à côté d’autres projets tels que la construction de la Zawiya Cheikh El Hadji Malick Sy à Paris, piloté par CES Daradji.

Tivaouane mérite ce rayonnement et ce respect que lui vouent les érudits du monde musulman. Dans ce sillage, ses fils se sont toujours distingués par la science et l’ouverture d’esprit qui fait le génie de la Tijâniyya. Ainsi, les prestigieuses Durûs Hasaniyya, cours magistraux organisés par le Roi du Maroc, pendant le mois de ramadan, reçoivent toujours avec autant d’enthousiasme, le fils du regretté El Hadji Abdou Azîz Sy, El Hadji Malick dit Maodo, à la vaste culture islamique et à la parfaite maîtrise de la langue arabe. Le poème émouvant qui clôtura sa communication, lors de cette assemblée, est resté un chef d’œuvre, encore consultable, dans les Archives de l’Institut des Etudes Africaines de Rabat au sein de l’Université Mohamed V.

Au-delà de la seule famille Sy, les fils de cette cité de la science et de la piété sont partout dans le monde pour perpétuer cet enseignement et veiller jalousement à l’héritage de Maodo, l’une des plus grandes fiertés de l’espace religieux sénégalais. Le travail de recherche fouillée qui produisit son ouvrage majestueux et inimitable, « Khlâsou Zahab », est mené dans un esprit digne des universités modernes avec les références classiques telles que le Murûju Zahab d’Al-Mas’ûdî, Tâjul ‘Arûs, Al-Kâmil fi-t-tâtîkh du célèbre Ibn Al-Athîr etc. L’énorme travail fourni par El Hadji Rawane Mbaye mérite postérité et approfondissement si l’on pense aux « trésors » qui ont tardé à être explorés dans Kifâyatu Râghibîna ou Ifhâm al-munkir al-Jâni. Il y consacra des efforts salués de toutes part avant de produire une traduction inédite des Jawâhirul Ma’ânî parue en janvier 2011.

Il serait grand temps que cet héritage trouve sa véritable place dans l’étude de notre patrimoine. Il n’est plus concevable qu’une ville qui a joué un si grand rôle dans l’histoire religieuse et intellectuelle du pays ne fasse l’objet d’études sérieuses. De ces recherches, aussi bien le patrimoine national, l’islam et ses adeptes que la jeunesse tireront un grand profit.

Pr Bakary Sambe

 mosquée de tivaouane

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