Parrainage : De l’irrespect caractérisé du Conseil Constitutionnel des règles établies ( par Daouda Ndiaye)

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Avec la publication prochaine de la liste des candidats qualifiés, les membres du Conseil constitutionnel (le conseil) confirment, qu’ils se sont, résolument, inscrits dans une logique, de ne point respecter les textes qui régissent le parrainage. Incorrigibles, dirions-nous, toutefois il faut reconnaitre leur constance, à persévérer sciemment dans l’erreur pour satisfaire le président Macky Sall. Comme nous l’avons précédemment écrit, le conseil connait le droit (« jura novit curia »), d’où il ne peut autant se tromper, dans la lecture, dans l’interprétation, et dans l’application de la loi, ses membres ont simplement failli à leurs serments.

Certains soutiendraient que s’attarder sur des aspects juridiques est un détail, ou une revendication dépassée, dès lors que (certes) les recalés enragent, que les « qualifiés » jubilent. Mieux encore, pour ceux-ci (recalés et qualifiés), cette période est à ranger dans les néfastes annales de l’histoire politique du pays. Qu’il nous soit permis, de nous inscrire en faux contre une telle affirmation, qui n’honore pas le fonctionnement normal d’un Etat démocratique.

Ainsi, la revendication, ou le combat pour le respect de l’application, ou de l’applicabilité d’une règle de droit n’est jamais insignifiant, et doit être mené par principe. Parce que, la structuration de quelque groupe social dépend de normes établies (écrites ou non), d’où tout manquement volontaire à celles-ci, doit être dénoncé et condamné, puisqu’il impacte négativement notre vivre ensemble. Et venant d’une institution étatique digne de confiance cela interpelle, et mérite une réflexion approfondie.

Nous avions précédemment souligné, les libertés excessives du conseil dans l’interprétation des textes sur le parrainage. Dans les prescriptions relatives aux délais pour l’affichage des listes des candidats, il continue sur le non-respect de la loi. Car, le dernier alinéa de l’article L.121, du code électoral énonce « au plus tard trente-cinq (35) jours avant le scrutin, le Conseil constitutionnel procède à la publication de la liste des candidats. Cette publication est assurée par l’affichage et par tout autre moyen qu’il estime opportun et nécessaire ».

Ici nous faisons appel à des notions que les juristes connaissent bien, surtout les civilistes, en matière de computation de délai, à savoir le « dies a quo » (jour à partir duquel), et le « dies ad quem » (jour jusqu’où, ou le jour d’arrivée). En restant dans le cadre strict de la loi, le « dies ad quem » (le jour jusqu’où), à savoir le terme du délai fixé par l’article L. 121, du code électoral, serait le 23 février 2019, cependant ce jour étant un samedi, il est reculé ou avancé (selon) au vendredi 22 février 2019.

Ainsi, le jour de l’affichage des listes ne devrait en aucun être aujourd’hui (le 11 janvier 2019), ou demain samedi (le 12 janvier 2019), ou encore dimanche (le 13 janvier 2019), et plus généralement un autre jour après. Toutefois, si le conseil est conséquent avec sa logique de bafouer nos lois, il devrait procéder à l’affichage de la liste des candidats, le 19 ou le 20 janvier 2019. Cependant, que la liste soit affichée aujourd’hui (vendredi), ou demain (samedi) voire après demain (dimanche), le décompte du nombre de jours ne commencera qu’à partir de lundi.

Comme le conseil a, ainsi, décidé de faire plaisir à Macky Sall, au mépris des lois sur le parrainage, nous l’acceptons malgré nous, tout en signifiant notre réprobation. C’est dire, mettre la date de l’affichage, un jour autre que le lundi 7 janvier 2019, à défaut, le mardi 8 janvier 2019, est manifestement en contradiction avec les prescriptions de l’article L. 121 précité. Dans une telle situation, la durée de 35 jours, fixée par la loi ne sera pas respectée. Pour rappel, en matière de computation de délai, si nous restons dans l’orthodoxie juridique, seuls les jours ouvrés sont comptabilisés. C’est-à-dire samedi, dimanche et jour férié sont exclus du décompte.

Aussi, il convient de faire remarquer, l’adverbe « avant », contenu dans la première phrase, permet de fixer le terme du délai des 35 jours, la veille du scrutin. D’autre part, la formulation du texte montre que, la durée des 35 jours rentre dans la catégorie des délais dits préfix en droit, d’où dans une telle situation, le conseil ne devrait aucunement y déroger. Mais encore, si ledit délai concernait les candidats, leurs inactions seraient frappées de forclusion. De plus, l’emploi du verbe « procéder » par le législateur tend, à accentuer l’impérativité du délai à respecter, pour la réalisation de la procédure d’affichage.

En outre, la loi (art. L. 121, al, dern. C. élect) emploie l’expression « au plus tard trente-cinq (35) jours avant le scrutin » et non « au plus tard dans les trente-cinq (35) jours avant le scrutin ». La nuance est importante, parce que, elle permet de comprendre, de situer ou de déterminer à partir de quel moment, le conseil doit procéder à l’affichage. Dans la première formulation, le délai est préfix la publication devant être faite, à une date donnée, dans la deuxième, il est variable, et la publication peut être faite, à n’importe quel moment dans la période visée.

Pour conclure nous relevons, pour avoir les faveurs du Chef de l’Etat, les membres du conseil constitutionnel sont prêts, à enfreindre toutes les lois du pays. Que, le conseil s’est emmuré dans sa propre logique juridique, depuis le début de l’instruction des dossiers, de parrainage en méconnaissance totale, des dispositions de la Loi n° 2018-22 du 04 juillet 2018. Comme nous l’avions déjà fait ressortir, le mode d’éviction de candidats, n’est fondé sur aucun texte, de plus il est plus subtil, parce que se faisant sur un fondement de légalité, alors qu’il en est rien.

A regret, nous avons le sentiment que, l’opposition politique semble se préparer (sciemment ou inconsciemment) à sa défaite, et son attitude très attentiste, voire passive, montre qu’elle risque d’en être complice. D’autre part, tétanisés par une éventuelle disqualification, les sélectionnés, du moment, ne pensent qu’à « survivre » pour affronter le président sortant (Macky Sall) aux élections présidentielles de 2019. Par contre, les recalés se rendent compte de l’injustice de la justice (du Conseil constitutionnel), et de sa partialité. Mais encore, sont très dépassés par leurs sorts, d’autant qu’ils savent, aucun recours ne pourrait aboutir. Pour apaiser leurs rancœurs, comme lot de consolation, une fois le dossier d’un candidat rejeté par le conseil, Macky Sall et ses amis s’empressent de le coopter, en les proposant des maroquins. Pareil procédé mériterait une réflexion approfondie.

Daouda NDIAYE

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